Attention, le droit évolue vite, ce qui est vrai aujourd’hui peut ne pas être vrai demain. Les articles présentés peuvent ne pas être totalement adaptés à votre situation ou à l’état du droit. Ils reflètent l’investissement de notre cabinet auprès des victimes.
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C’est une décision intéressante que vient de rendre le Tribunal de Grande Instance de Grenoble et obtenue par le cabinet le 16 mars dernier.
Dans cette décision, le tribunal réévalue le taux de déficit fonctionnel permanent fixé par l’expert judiciaire à la lumière des éléments de discussion apportés par la victime.
Ce faisant, le juge rappelle que le rapport de l’expert n’est qu’un élément au débat et, par là même, invite les médecins experts à respecter les termes de la nomenclature Dinthilac.
La motivation du Tribunal de Grande Instance est la suivante:
« Déficit fonctionnel permanent
Le déficit fonctionnel permanent est fixé par l’expert à 18 %.
La valeur du point retenue par (la victime) et acceptée par la MACIF s’élève à 1.375 € soit un montant d’indemnisation de 24.750 €.
Considérant toutefois que l’expert n’a retenu que les atteintes physiques et non la perte de qualité de vie et les troubles ressentis par lui, (la victime) sollicite un montant global de 29.000 €.
L’expert indique retenir un taux de 18% en « tenant compte de la raideur du poignet gauche dans le secteur utile, touchant la flexion, l’extension et la prono-supination du côté dominant chez un gaucher, les zones d’hypoesthésie et de dyesthésie au niveau de la main gauche et le défaut de flexion de P2/P3 au niveau des quatre premiers doigts de la main gauche chez un gaucher ».
L’expert s’est donc concentré uniquement sur les atteintes aux fonctions
physiologiques sans prendre en compte la douleur permanente, la perte de qualité de vie et les troubles dans les conditions d’existence. Or outre la diminution de la force au niveau de la main gauche et les difficultés de préhension, (la victime) fait état dans l’expertise notamment de douleurs qui irradient dans l’avant-bras gauche lors d’efforts ou de position prolongée et une gêne dans la gestuelle quotidienne.
En demandant une augmentation de son indemnisation, (la victime) sollicite nécessairement une révision du taux de déficit fonctionnel permanent qui sera réévalué et fixé à 20 %.
Il sera en conséquence alloué à [la victime] au titre de son déficit fonctionnel permanent la somme de 27.500 €. »
Dans cette décision, le Tribunal de Grande Instance rappelle d’abord que le rapport de l’expert judiciaire n’est qu’un élément de discussion susceptible d’être complété et, comme en l’espèce, modifié par le juge qui conserve à son égard toute sa liberté.
Surtout, le Tribunal n’a fait que constater ce à quoi nous nous heurtons de façon régulière : les experts médicaux définissent trop souvent le taux de déficit fonctionnel permanent, lorsqu’ils ne sont pas obligés par un guide particulier (accident du travail, pensions civiles et militaires) par la simple référence barèmique à des tableaux issus, soit de ce que l’on nomme le Barème du concours médical dit encore « de droit commun », plus rarement celui de la société de médecine légale et criminologie, beaucoup plus rarement encore le guide barème européen.
Or, ces barèmes envisagent seulement la perte de la fonction touchée par le dommage, par opposition à la pleine capacité (100%) de tout individu sans incapacité quelconque.
Cependant, la nomenclature Dinthilac, du nom de celui qui a permis une « révision » des postes de préjudices indemnisables, élargit cette définition du déficit fonctionnel permanent:
« Ce poste de préjudice cherche à indemniser un préjudice extra-patrimonial découlant d’une incapacité constatée médicalement qui établit que le dommage subi a une incidence sur les fonctions du corps humain de la victime.
Il s’agit ici de réparer les incidences du dommage qui touchent exclusivement à la sphère personnelle de la victime. Il convient d’indemniser, à ce titre, non seulement les atteintes aux fonctions physiologiques de la victime, mais aussi la douleur permanente qu’elle ressent, la perte de la qualité de vie et les troubles dans les conditions d’existence qu’elle rencontre au quotidien après sa consolidation.
Ce poste peut être défini, selon la Commission européenne à la suite des travaux de Trèves de juin 2000, comme correspondant à “la réduction définitive du potentiel physique, psycho- sensoriel, ou intellectuel résultant de l’atteinte à l’intégrité anatomo-physiologique médicalement constatable donc appréciable par un examen clinique approprié complété par l’étude des examens complémentaires produits, à laquelle s’ajoutent les phénomènes douloureux et les répercussions psychologiques, normalement liées à l’atteinte séquellaire décrite ainsi que les conséquences habituellement et objectivement liées à cette atteinte dans la vie de tous les jours”.
En outre, ce poste de préjudice doit réparer la perte d’autonomie personnelle que vit la victime dans ses activités journalières, ainsi que tous les déficits fonctionnels spécifiques qui demeurent même après la consolidation. »
Voilà une définition qui va bien au delà de la simple lecture que doit faire l’expert du barème « mathématique » de la seule perte de fonction…..
Pour plus de renseignements, consulter le rapport du groupe de travail chargé d’élaborer une nomenclature des préjudices corporels.
L'auteur de cet article :
Me Hervé Gerbi, Avocat fondateur et Gérant.
Avocat à Grenoble, Maître Hervé GERBI est spécialisé en dommages et préjudices corporels, et en corporel du travail. Il est titulaire d’un diplôme de psychocriminalité (analyse criminelle).