Attention, le droit évolue vite, ce qui est vrai aujourd’hui peut ne pas être vrai demain. Les articles présentés peuvent ne pas être totalement adaptés à votre situation ou à l’état du droit. Ils reflètent l’investissement de notre cabinet auprès des victimes.
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Il y a quelques semaines, la lecture d’un rapport d’expertise psychiatrique me laissait sans voix. L’expert relevait en effet en conclusions d’un rapport concernant une victime de plus de 60 ans, au titre des « états antérieurs » les éléments suivants : « retard d’acquisition de la marche » et « tendance addictive au sport à l’adolescence ».
Le 13 juin dernier, la Cour de Cassation rendait heureusement un arrêt inédit dans un dossier que nous soutenons depuis presque 9 ans, de nature à écarter au rebus ce genre d’analyse.
Elle rappelle, dans sa décision, un principe qui parait simple mais pourtant au combien malmené par les experts judiciaires : un trait de personnalité n’est pas en soi un état antérieur susceptible de réduire le droit à indemnisation de la victime.
Les faits sont les suivants :
J. est victime à l’âge de 4 ans d’un accident de circulation qui l’atteint aux membres inférieurs.
Il bénéficie de soins pendant 17 ans, si bien que sa consolidation intervient à l’âge de 21 ans, avec un taux d’incapacité résiduel de 34%.
17 ans de soins, pour un enfant âgé de 4 ans au moment de l’accident, autant dire que la scolarité est un échec total : il est déscolarisé, et n’acquiert aucune compétence spécifique.
J. se replie sur lui-même et développe sur le plan psychologique des mécanismes qui font relever par l’expert psychiatre désigné « des conduites d’évitement avec phobies sociales, des cauchemars spécifiques en lien avec l’accident…parfois associés à des idées de mort».
Constatant l’impossibilité pour ce jeune homme de se débrouiller au quotidien par lui-même sans l’intervention de ses parents chez lesquels il réside, le débat s’est logiquement porté sur la nécessité d’une aide humaine.
Acceptée en viager pour les besoins palliant le handicap physique, l’aide humaine est limitée à 2 ans pour l’accompagnement social nécessaire consécutif à ses « conduites d’évitement avec phobies sociales …parfois associés à des idées de mort » au motif, pour l’expert psychiatre, tel que résumé par la cour de cassation, « qu’une absence de mobilisation de sa part sur cette période serait objectivement due à des facteurs de personnalité se situant en dehors des conséquences du dommage dont il est demandé réparation ».
Appelée à statuer sur ce point, la Cour de Cassation casse l’arrêt de la Cour d’Appel de Grenoble du 29.05.2018 qui avait suivi les experts plutôt que l’argument que nous soutenions et motive ainsi clairement une jurisprudence qui paraissait déjà pourtant bien établie :
« Qu’en statuant ainsi, sans constater que les effets néfastes de ces facteurs de personnalité s’étaient déjà révélés avant l’accident, la cour d’appel n’a pas donné de base légale à sa décision ».
L'auteur de cet article :
Me Hervé Gerbi, Avocat fondateur et Gérant.
Avocat à Grenoble, Maître Hervé GERBI est spécialisé en dommages et préjudices corporels, et en corporel du travail. Il est titulaire d’un diplôme de psychocriminalité (analyse criminelle).